De l'importance d'être un PNJ
L'impératif catégorique à l'époque du syndrome du personnage principal.
Vous avez sûrement entendu parler du PNJ, personnage non joueur, véritable bot souvent moqué. Je vais ici prendre le contre-pied : Et si c’était ce que le système actuel redoutait plus que tout ? Un Homme conscient de ses biais et des limites du libre arbitre.
L’injonction à réagir et l’esprit démocratique
Ce n’est un secret pour personne ici : L’esprit démocratique ne représente pas seulement le fonctionnement d’un système politique. Il est aussi un élément transformateur de l’être humain, qui se base sur des présupposés d’égalité et de libre arbitre pour donner à l’Homme un ensemble de droits pour faire fonctionner la société. Elle découle d’un idéalisme qui voit l’Homme comme mesure ultime et qui part de la position que le libre arbitre existe ET qu’il existe pour tout le monde… Quelle idée… chrétienne ?
Le décri, la décadence et la mort de l’État, l’affranchissement de la personne privée (je n’ai garde de dire : de l’individu) est la conséquence de l’idée démocratique de l’État ; en cela consiste sa mission.
(Nietzsche, Humain, trop humain I, §472)
Si les sociétés pré-démocratiques se caractérisaient par un faible niveau d’alphabétisation et un désintérêt de la chose publique, on peut dire que la société démocratique elle repose sur un nivellement de la population et de leurs opinions. Plus que ca, maintenant le citoyen doit donner son avis sur tous les sujets qui concernent la Cité (quel que soit d’ailleurs le niveau intellectuel du dît citoyen). Le citoyen doit donc maintenant avoir un avis réfléchi sur tous les sujets car, voyez-vous, son avis compte !
La conséquence morbide de cela on la voit tous les jours : le brouhaha d’idiots est devenu la norme et la conséquence logique de notre système. A cela on ajoute les avancées technologiques en matière d’information et on arrive à un cocktail explosif.
Le sujet ici n’est pas de flatter un fonctionnement pré-démocratique en soi, mais juste de vous faire remarquer que le système politique actuel repose sur l’expression de l’opinion de Monsieur-Tout-Le-Monde sur absolument TOUS les sujets.
Illusion du choix et immobilisation décisionnelle
C’est là que nous rentrons dans le vif du sujet, dans ce qui fâche : Comment se fait-il que nous sommes médiocre dans une société qui pourtant offre tant de libertés ?
C’est le moment de développer le concept de “paradoxe du choix” établi et sourcé par un psychologue américain (Barry Schwartz). Le constat est limpide : La liberté est motivationnelle pour l’homme mais passé un certain nombre d’options disponibles… On voit apparaître une paralysie décisionnelle et une charge cognitive accrue.
Je pense qu’on en a tous fait l’expérience et on le constate même sur les réseaux sociaux : un trop grand nombre de choix possibles a un impact sur notre comportement ET le ressenti qu’on a sur l’expérience en elle-même.
L’exemple parfait ? Le doux souvenir nostalgique d’un dessin animé qu’on regardait 5 fois par an (c’était une des 3 VHS qu’on avait à la maison) par rapport à notre désarroi devant le catalogue quasi-infini de Netflix. Notre modèle de société nous a promis une très grande liberté, et nous l’avons eu ! Mais au final pour quoi faire ? Pourquoi avoir autant de choix possibles si la conclusion logique c’est que nous n’avons plus l’énergie ou l’impulsivité d’agir pour changer le monde ?
Se restreindre pour agir
C’est là que pour moi l’Homme intelligent doit se servir de ces études et de ces constats pour mettre en place des systèmes qui le feront agir et le rendront plus satisfait. S’il est impossible pour l’Homme de toujours décider pour TOUT, d’avoir toujours un avis sur TOUT… Alors le mieux reste de choisir ses batailles et d’enclencher le mode pilote automatique pour le reste.
Mon avis sur les nouvelles réglementations agricoles proposées par le premier ministre sur une ènième chaine d’actualités ? Je n’en ai absolument pas et je m’en porte très bien. Il y a juste à regarder une vidéo “micro-trottoir" pour s’assurer que tout le monde a un avis sur tout, et que la plupart du temps cet avis est biaisé voire complètement abruti.
Si un sujet pour vous ne mérite pas votre attention, alors appliquez ce que j’appelle moi un impératif catégorique ! Une règle assez générale pour être appliquée sur à peu près tous les sujets inintéressants. Que ce soit des sujets d’actualité ou autre, je vous assure que vous n’avez pas d’obligation morale à avoir un avis ou même pire… à l’exprimer. Faites un tri salutaire sur ce qui entre dans votre tête et sur ce qui sort de votre bouche. Je vous assure que vous garderez du temps et de l’énergie mentale pour des sujets qui sont vraiment importants (écrire un blog substack de niche et ultra bizarre pour vos amis d’internet).
Une règle que je me donne pour moi-même est de compter jusqu’à 5 quand j’entends un sujet inconnu pour décider s’il mérite ma réflexion et mon temps.
Et la conclusion de tout ca ?
Les systèmes humains ont un impact sur la cognition et les habitudes humaines qui sont pourtant inscrites en nous depuis des millénaires. Donner un avis et la puissance (de nuisance) qui va avec à des individus à 82 de QI n’est pas forcément souhaitable pour l’avenir. Surtout quand il y a une telle décorrélation entre le choix de l’individu et les conséquences qui vont avec. Vouloir toujours plus d’un Etat maman endetté ? Pas ma faute c’est la faute aux politiques si ca pète ! Et de toute manière c’est mes enfants qui régleront la note pas moi.
Je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils emplissent leur âme. Chacun d’eux, retiré à l’écart, est comme étranger au destin de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas ; il les touche et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul, et, s’il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu’il n’a plus de patrie.
(Tocqueville, De la démocratie en Amérique, deuxième partie, livre IV, chap. VI — « Quelle espèce de despotisme les nations démocratiques ont à craindre »)
Ne soyez pas comme les autres “joueurs principaux”, choisissez votre quête, concentrez-vous sur ce qui a de l’importance, méprisez les idiots et soyez de Droite.





